Chapitre 10 : Entreprendre seul

Diverses raisons, dont celle de ne pas partager son pouvoir, peuvent amener le futur exploitant à entreprendre seul. Plusieurs cadres juridiques sont possibles pour mener ce projet.

I. Les caractéristiques de l'entreprise individuelle

A. La micro-entreprise, la forme la plus simple

Toute personne physique, même si elle est salariée, retraitée ou demandeuse d'emploi, peut créer une micro-entreprise (auparavant auto-entreprise).

Les formalités de création sont simples et rapides : les obligations comptables sont réduites, les ventes sont exonérées de TVA, ce qui favorise l'activité du micro-entrepreneur en lui permettant d'offrir des biens et services moins chers.

Mais le statut de micro-entrepreneur est réservé aux entreprises dont l'activité ne dépasse pas un certain chiffre d'affaires (33 200€ pour les activités de services et 82 000€ pour les activités commerciales) et toutes les activités ne sont pas accessibles au micro-entrepreneur.

La micro-entreprise veut favoriser des activités nouvelles telles que les services à la personne par exemple.

B. L'entreprise individuelle classique

L'entrepreneur qui veut entreprendre seul peut opter pour la forme classique de l'entreprise individuelle. C'est la forme juridique d'entreprise la plus utilisée : 80% des entreprises sont des entreprises individuelles.

II. Les risques de l'entreprise individuelle

L'entreprise individuelle n'a pas la personnalité juridique.

Les patrimoines de l'entreprise et de l'entrepreneur sont confondus ; biens personnels de l'entrepreneur et biens professionnels appartiennent au patrimoine de l'entrepreneur.

Ainsi, la garantie des créanciers de l'entrepreneur est l'entier patrimoine de l'exploitant. En cas de défaillance de sa part, ses créanciers pourront le poursuivre sur l'ensemble de ses biens.

On parle de responsabilité illimitée de l'entrepreneur individuel. Cette règle fait peser sur l'entrepreneur une menace grave.

III. L'atténuation du principe de la responsabilité illimitée de l'entrepreneur individuel

A. L'insaisissabilité des biens immobiliers

L'entrepreneur indivividuel peut effectuer une demande d'insaisissabilité de la partie personnelle ou domestique de son patrimoine.

Cette déclaration concerne ses droits sur l'immeuble où il a sa résidence principale et sur tout bien foncier bâti ou non bâti qu'il n'a pas affecté à son usage professionnel.

La déclaration d'insaisissabilité est déposée auprès du registre de publicité légale et devant notaire afin d'informer les créanciers de l'entrepreneur individuel que les biens ainsi protégés ne pourront pas être saisis pour payer leurs créances.

B. L'entreprise individuelle à responsabilité limitée (EIRL)

L'entrepreneur qui veut s'engager seul dans son activité peut créer une EIRL.

Grâce à cette forme juridique, le patrimoine du chef d'entreprise est partagé en deux parties disjointes : la partie professionnelle du patrimoine, c'est-à-dire l'ensemble des biens que l'entrepreneur a affecté à son activité ou patrimoine d'affectation, et la partie personnelle de son patrimoine.

Seul le patrimoine d'affectation viendra en garantie des dettes professionnelles de l'entrepreneur.

La création d'une EIRL implique que l'entrepreneur procède à une déclaration d'affectation auprès du centre de formalités des entreprises (CFE) et du notaire s'il s'agit de biens fonciers. De plus, l'entrepreneur qui opte pour cette forme juridique d'entreprise devra porter sur tous les documents de l'entreprise la mention « EIRL ».

Ainsi, les créanciers de l'entreprise pourront mesurer l'étendue des garanties que leur apporte l'entrepreneur dans l'exercice de son activité professionnelle.

C. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL)

L'EURL est une autre forme juridique d'entreprise permettant de protéger le patrimoine personnel de l'entrepreneur. Ce n'est plus une entreprise individuelle au sens propre, c'est une forme de société.

L'EURL est dotée de la personnalité morale dès lors que l'associé a procédé aux formalités d'immatriculation auprès du registre du commerce et des sociétés.

Les apports de l'associé unique constituent le capital, c'est-à-dire la fortune de l'EURL qui viendra en garantie des dettes de l'entreprise.

La responsabilité de l'associé fondateur est limitée à ses seuls apports.

D. Les limites à l'atténuation de la responsabilité de l'entrepreneur

L'entrepreneur a besoin de ressources financières pour mener à bien son projet. En cas de besoin, il peut avoir recours au crédit. La confiance des banques comme de tout créancier et donc les facilités de crédit qu'ils lui consentiront seront d'autant plus grandes qu'ils connaîtront un patrimoine important.

Si le patrimoine d'affectation d'une EIRL ou si le capital d'une EURL sont jugés insuffisants pour garantir les dettes de l'entreprise, les créanciers exigeront un engagement de l'entrepreneur sur ses biens personnels, ce qui réduit l'intérêt de ces deux formes juridiques d'entreprise.