Chapitre 3 : Quels sont les domaines d'intervention de l'État en matière sociale ?
I. Pourquoi mener une politique sociale ?
A. Qu'est-ce qu'une politique sociale ?
L'État mène des politiques structurelles sociales (par sa fonction redistributive) dans le but de réduire les inégalités de la répartition des revenus et de protéger les individus contre certains risques dits sociaux.
B. La réduction des inégalités
Les revenus primaires des ménages, issus de leur travail et/ou de leur patrimoine, font apparaître d'importantes inégalités.
1°) La notion de décile
Si on ordonne une distribution de salaires, de revenus, de chiffres d'affaires, etc., les déciles sont les valeurs (9 au total) qui partagent cette distribution en dix parties d’effectifs égaux.
Ainsi pour une distribution de revenus :
- le premier décile (noté généralement D1) est le revenu au-dessous duquel se situent 10 % des revenus ;
- le neuvième décile (noté généralement D9) est le revenu au-dessous duquel se situent 90 % des revenus.
Le premier décile est, de manière équivalente, le revenu au-dessus duquel se situent 90 % des revenus ; le neuvième décile est le revenu au-dessus duquel se situent 10 % des revenus. (INSEE)
Tranches de niveau de vie | Limites des tranches (déciles) en euros par an |
---|---|
10% des Français avaient moins de | 11 660 (D1, premier décile) |
10 % des Français avaient entre | 11 660 et 14 790 (D2) |
10 % des Français avaient entre | 14 790 et 17 410 (D3) |
10 % des Français avaient entre | 17 410 et 19 730 (D4) |
10 % des Français avaient entre | 19 730 et 22 040 (D5) |
10 % des Français avaient entre | 22 040 et 24 510 (D6) |
10 % des Français avaient entre | 24 510 et 27 590 (D7) |
10 % des Français avaient entre | 27 590 et 31 770 (D8) |
10 % des Français avaient entre | 31 770 et 39 930 (D9, dernier décile) |
10 % des Français avaient plus de | 39 930 (D9) |
Rapport D9/D1 | 3,43 |
2°) Le revenu médian
On appel revenu ou niveau de vie médian celui qui partage les individus en deux groupes d'effectifs égaux (noté généralement D5) : 50% perçoivent un revenu supérieur et 50% un revenu inférieur (il est de 22 040€ annuel dans l'exemple précédent).
3°) Les rapports interdéciles
Les rapports interdéciles des revenus sont utilisés pour mettre en évidence les disparités (ou écarts) entre les plus riches et les plus pauvres (voir l'exemple ci-dessus).
4°) Les facteurs de disparité des revenus primaires
Le salaire est une source importante de différences entre les individus. En effet, une grande majorité de la population ne dispose pas de revenus du patrimoine et le salaire est alors le facteur discriminant.
Il varie essentiellement en fonction de l'âge, du sexe, de la catégorie socioprofessionnelle de l'individu, ainsi que de la branche d'activité et de la taille de l'entreprise qui l'emploi.
C. La lutte contre la pauvreté
La pauvreté monétaire peut soit être :
- absolue : cas d'un individu dont les besoins primaires ne peuvent être satisfaits faute de revenus suffisants (ou ne bénéficiant pas du minimum vital) ;
- relative : situation d'une personne dont les revenus (ou ceux de son ménage) l'empêchent de parvenir à un niveau de vie considéré comme normal dans une société.
La mesure de la pauvreté en France est principalement opérée de façon relative (en pourcentage du niveau de vie médian) et non de façon absolue (niveau de vie à prix constants). Sa mesure reflète ainsi essentiellement un des aspects de l'inégalité des niveaux de vie, c'est-à-dire des revenus disponibles bruts par unité de consommation des ménages.
L'INSEE fixe le seuil de pauvreté à 60% du niveau de vie médian (en se référant à l'exemple plus haut, ce seuil vallait 13 224€ : 22 040 x 60 / 100).
Ce seuil permet de définir le taux de pauvreté monétaire, qui correspond à la proportion d'individus (ou de ménages) en situation de pauvreté monétaire.
Depuis 2002 le nombre de personnes pauvres progresse de nouveau, après la diminution observée depuis les années 1970. Selon l'INSEE, 10,1 millions de français vivaient en 2018 sous le seuil de pauvreté (de 1074 euros mensuel, soit un taux de pauvreté de 14,8%).
Le développement du chômage de masse et des emplois atypiques explique la montée de la pauvreté relative. Les personnes les plus touchées sont les enfants, les jeunes et les seniors.
II. Quelles sont les modalités de la politique sociale menée par l'Etat ?
A. La protection sociale
La protection sociale, fondée sur le principe de solidarité, occupe une place centrale parmi les politiques sociales. Elle se manifeste concrètement par des prélèvements obligatoires efffectués par des instances spécifiques chargées de redistribuer des allocations (ou prestations) sociales à la population, sans contrepartie productive.
1°) Les logiques d'assurance et d'assistance
Deux logiques sont à l'œuvre dans la mise en place de la protection sociale :
- une logique d'assurance contre les différents risques sociaux : l'assurance sociale est un système d'assurances obligatoires auxquelles les ménages peuvent cotiser (pour un montant très inférieur aux effets financiers des risques encourus) afin de percevoir des prestations en cas de baisse de leur revenu (chômage, retraite, etc.) ou d'une hausse de leurs dépenses (frais médicaux, enfant à charge, etc.) ;
- une logique d'assistance qui instaure une solidarité entre les individus par le versement de minima sociaux aux plus démunis, sans versement de cotisations préalables (ex. : le revenu de solidarité active – RSA, la couverture maladie universelle – CMU, l'allocation aux adultes handicapés – AAH).
2°) Les différents risques sociaux couverts par la protection sociale
Risques sociaux | Modalités de couverture |
---|---|
Emploi (chômage et insertion professionnelle) | L’assurance chômage (une des modalités de protection liée à l'emploi) consiste en le versement d’indemnités venant compenser la perte de revenus consécutive au chômage. |
Santé (maladie, invalidité, accidents du travail et maladies professionnelles) |
La protection se fait par :
|
Famille |
Il s'agit :
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Logement | Les aides au logement visent à permettre aux ménages à faible revenu d’accéder à un logement ou de s’y maintenir, qu'ils soient locataires ou accédants à la propriété |
Vieillesse |
Les prestations liées à la vieillesse (en espèces ou en nature) :
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Pauvreté, exclusion sociale | Il s'agit des prestations pouvant être versées aux personnes socialement « exclus » ou menacées de l'être (les personnes démunies, aux ressources insuffisantes, immigrées, réfugiées, toxicomanes, alcooliques, victimes d'actes de violence...) |
3°) La Sécurité sociale
La protection sociale relève principalement des organismes de sécurité sociale. Ces administrations publics sans but lucratif sont chargées de la gestion des différents régimes d’assurance sociale (régime général de la Sécurité sociale, régime spécial de retraite des fonctionnaires civils et militaires...).
4°) L'assurance chômage
L’Unedic est une association chargée par délégation de service public de la gestion de l'assurance chômage en France, en coopération avec Pôle emploi.
5°) Les régimes complémentaires
Il s’agit des mutuelles et régimes d'assurance facultatifs, qui proposent aux assurés sociaux des garanties et des prestations complémentaires à l'assurance maladie et les systèmes de retraite complémentaire, constituant le deuxième niveau du système des retraites.
B. Le financement de la protection sociale dans le cadre de la redistribution
La protection sociale est financée par les cotisations sociales (salariales et patronales) et l'impôt.
Le dispositif d'assurance de la protection sociale est financé par le prélèvement des cotisations sociales.
Le dispositif d'assistance est financé par les impôts.
C. Redistribution horizontale et verticale des revenus
La redistribution horizontale des revenus correspond aux transferts sociaux faits aux individus et ménages victimes de risques sociaux.
La redistribution verticale des revenus correspond aux transferts sociaux destinés à réduire les inégalités de revenu des ménages ou individus.
C. Un exemple de politique sociale : le traitement du chômage
Dans une logique d'assurance, l'État intervient pour garantir un minimum de ressources aux personnes qui perdent leur emploi. Le traitement social du chômage par l'État tente de rendre supportables les conséquences économiques et sociales de l'absence d'activité professionnelle pour l'individu.
Le montant de l'aide au retour à l'emploi (ARE), géré par l'Unedic, dépend de la durée de cotisation et du niveau de salaire perçu avant la rupture du contrat.