Chapitre 5 : Les conditions de travail
I. L'élaboration des règles fixant les conditions de travail
A. Le rôle de la loi dans la construction du droit du travail
Les sources du droit du travail, droit protecteur du salarié, sont diverses.
La loi demeure cependant la première de ces sources. Elle édicte des règles qui s'imposent à tous les employeurs et qui s'appliquent à tous les salariés, quels que soient le secteur d'activité et l'entreprise concernés.
À ce titre, la loi apparaît comme le socle de protection minimale des travailleurs.
Ainsi, elle réglemente certains points délicats du contrat de travail comme, par exemple, la durée maximale de la période d'essai en CDI.
B. Les règles d'ordre public
En droit du travail, certaines règles ne peuvent pas admettre de dérogation. On les qualifie de règles d'ordre public pour indiquer qu'aucune autre source de droit ne peut les écarter : ni la convention collective, ni un accord d'entreprise, ni a fortiori le contrat de travail.
Les plus importantes des dispositions d'ordre public, comme le droit de grève, le droit à la Sécurité sociale, etc., sont contenues dans les textes constitutionnels.
Parfois, elles proviennent de textes de loi ou de règlements (textes adoptés par le Gouvernement), comme la détermination de la compétence du conseil des prud'hommes, les règles de procédures, etc.
La raison d'être des règles sociales d'ordre public est la volonté d'établir de façon définitive et souvent irréversible des protections essentielles à la défense des salariés.
C. Les conditions de travail d'origine conventionnelle
1°) Le principe de faveur
Selon le principe de faveur, les accords colectifs, sources "inférieures" de droit par rapport à la législation, peuvent édicter des règles diférentes des dispositions de la loi seulement si la dérogation est favorable aux salariés.
Le principe de faveur gouverne les rapports entre la loi et les accords collectifs et en principe également les rapports entre les accords de niveau supérieur et ceux de niveau inférieur.
2°) Les accords dérogatoires
Toutes les règles conventionnelles ne respectent pas le principe de faveur.
En effet, il n'est pas interdit, sauf dans quelques domaines du droit (comme en matière de rémunération minimale, par exemple), d'élaborer des conditions conventionnelles de travail moins avantageuses que les conditions légales. Les accords qui les énoncent sont dits « dérogatoires ».
L'objectif des accords dérogatoires est d'adapter le droit du travail au particularisme de certains secteurs d'activité ou de certaines entreprises. Il appartient aux syndicats de salariés qui les négocient avec des employeurs d'obtenir des compensations aux dérogations défavorables.
II. Les principales règles gouvernant les conditions de travail
A. Le temps de travail et le repos
1°) La durée légale et la durée maximale du travail
La durée légale du travail est fixée à 35 heures par semaine ou à 1607 heures par an.
Les heures de travail imposées par l'employeur au-delà de la durée légale sont des heures supplémentaires, mieux payées.
Le recours aux heures supplémentaires est possible car il permet d'ajuster la quantité de travail aux impératifs du moment.
Mais les dépassements de la durée légale ne doivent pas être excessifs. Ainsi la loi pose-t-elle le principe d'un contingent maximum d'heures supplémentaires, pour l'année et par salarié.
Il revient aux accords collectifs de le déterminer ; à défaut, la règle légale le limite à 220 heures.
La loi prévoit une majoration de la rémunération des heures supplémentaires : soit cette majoration est fixée par accord collectif, soit la règle légale s'applique (+25% pour les 8 premières heures hebdomadaires et 50% au-delà).
Il existe aussi une durée hebdomadaire maximale de travail, heures supplémentaires comprises : elle est de 18 heures pour une semaine isolée, 44 heures en moyenne sur une période de 12 semaines consécutives. La durée quotidienne du travail est elle-même limitée à 10 heures.
2°) Les assouplissements de la durée du travail
La loi permet aux entreprises connaissant des variations de leur taux d'activité selon les moments de l'année de mettre en place un aménagement du temps de travail.
Ce dispositif est négocié avec les représentaux syndicaux, soit au niveau de la branche, soit au niveau de l'entreprise.
Il consiste à organiser l'alternance entre des périodes de semaines longues et des périodes de semaines courtes, la durée des secondes compensant la durée des premières, le tout en respectant une moyenne de 35 heures hebdomadaires annuelles.
3°) Les repos périodiques
Le salarié bénéficie de certains repos tout au long de l'année :
- Le repos quotidien est d'une durée minimum de 11 heures consécutives,
- le repos hebdomadaire doit avoir une durée minimale de 24 heures consécutives et est en principe donné le dimanche.
4°) Les congés payés
Tout salarié a droit à des congés payés par son employeur. Il est attribué deux jours et demi de congés pour chaque mois de travail effectif dans la "période de référence" (généralement le 1er juin de l’année précédente au 31 mai de l’année en cours), soit 30 jours ouvrables ou 5 semaines.
B. La rémunération
1°) Le salaire
Le salaire est fixé et révisé par accord entre les parties.
La première négociation se déroule à l’occasion de l’établissement du contrat de travail. Elle est parfois théorique, ce type de contrat étant souvent d’adhésion.
2°) Les éléments non salariaux
D’autres éléments, non salariaux, peuvent contribuer à la détermination de la rémunération. Ils constituent l’épargne salariale :
- la participation consiste dans la répartition d’une part des bénéfices au personnel. Ce dispositif est obligatoire à partir de 50 salariés, facultatif en deçà. Si les fonds acquis sont bloqués 5 ans, ils sont exonérés d’impôt lors de leur distribution au personnel ;
- l'intéressement est constitué de primes versées aux salariés pour récompenser les gains de productivité, les améliorations de la qualité ou tout autre progrès dans le travail. Les sommes sont disponibles, mais elles sont imposées comme tout autre revenu ;
- le plan d'épargne entreprise (PEE) est un système d’épargne collectif, qui permet aux salariés de se constituer un portefeuille de valeurs mobilières (actions, obligations) avec l’aide de l’entreprise.
3°) Le SMIC
Le SMIC est le montant minimum du salaire pour toute personne employée en France (une minoration peut s’appliquer, sous conditions, au salarié mineur et à l’apprenti).
Ce salaire plancher est régulièrement revalorisé. Le mode de calcul appliqué à sa révision permet d’assurer, de façon progressive, une augmentation du pouvoir d’achat des salariés qui le perçoivent.
C. La sécurité des salariés
L’employeur est garant de la sécurité de son personnel. À ce titre, il assume une obligation contractuelle de résultat.
S’il n’a pas su assurer cette sécurité, il s’expose à des sanctions civiles – des dommages et intérêts – en cas de poursuite devant les tribunaux. S’il a négligé de prendre des précautions face à un danger qu’il aurait dû prévoir, sa faute est qualifiée d’inexcusable.
III. Les contrats précaires
A. Les clauses relatives à l'exécution du contrat
Les conditions de travail dépendent également du contrat de travail. L’employeur y fait figurer des clauses qui lui permettent d’obtenir une juste adéquation de la prestation du salarié à ses besoins.
- La clause de période d’essai, qui permet de rompre librement le contrat de travail, donne la possibilité de tester les compétences et l’adaptation du salarié à ses fonctions.
- La clause de mobilité permet d’envisager une mutation éventuelle du salarié vers un autre lieu de travail, précisément défini dès l’origine.
B. les clauses renforçant la loyauté du salarié
- La clause de confidientalité interdit au salarié, sous peine de licenciement, de révéler des informations sensibles, de nature technique, commerciale, stratégique dont il a connaissance.
- La clause de non-concurrence impose au salarié dont le contrat de travail est rompu de se faire embaucher ou de s’établir à son compte dans des conditions à faire concurrence à son ancien employeur.
Cette clause ne peut pas avoir une portée absolue (durée limitée, zone visée limitée, activité visée limitée), elle doit être indispensable à la défense des intérêts de l’entreprise et elle doit prévoir une contrepartie financière non dérisoire pour le salarié. Selon la jurisprudence, sa validité est liée au respect de ces principes.